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Organisation Taylorienne

jeudi 27 mars 2003

De l’organisation - Organisation Taylorienne

Le modèle "classique"

1.L’environnement de l’entreprise

2.Nature de l’information sur l’environnement

3.L’organisation

4.Principes de gestion et système d’information de gestion

5.Décision et contrôle, éléments concernant la formation de la stratégie

6.La culture des modèles de standardisation et de variété

7.Cohérence des modèles de standardisation et de variété

Il y a 200 ans, Adam Smith affirmait l’existence du cercle vertueux entre l’extension du marché, l’accroissement de la productivité et la baisse de prix.

À ce principe fondamental correspond le modèle de standardisation, initié sous le nom de "taylorisme" et devenu "fordisme". Il se caractérise par une logique marchande "pure", un environnement stable, une production de masse de biens homogènes, une division du travail poussée, une décision centralisée, une culture de la fonction et de la "position sociale" et un système de gestion exclusivement financier.

Le moteur de passage du modèle de standardisation au modèle de variété est l’hétérogénéité croissante de la demande (augmentation des exigences des consommateurs par rapport au début de la production de masse) nourrie elle même par la recherche constante de rentes nouvelles par les entreprises. Le modèle de variété est en effet une version du modèle de standardisation. On a une variété des produits finis, mais leurs composants sont standardisés. L’élément de différenciation, la "nouveauté" apportée par le produit est la manière de combiner ces composants. Il ne s’agit d’une démarche poussée d’innovation. Le modèle de variété est lui aussi basé sur la logique marchande pure.
La logique marchande "pure" prend en compte pour l’environnement de l’entreprise seulement le marché, c’est-à-dire la demande, la concurrence et la technologie.
Les éléments politiques et les autres groupes d’intérêt ne sont pas pris en compte. La logique marchande "pure" est basée sur la rationalité de l’agent économique, qui recherche son intérêt personnel et maximise son utilité sous contrainte, et sur l’interaction des décisions individuelles mutuellement compatibles par le marché.

On peut dire : dans un monde stable, avec les règles du jeu bien définies et invariables, il faut jouer le jeu pour gagner.

En grandes lignes on peut situer le modèle de standardisation jusqu’à la fin des années 70, et le modèle de variété jusqu’à la fin des années 80 tout en remarquant que :
- le passage d’un modèle à l’autre s’est fait graduellement, en environ une dizaine d’années, différencié par secteur économique (pour les automobiles, même à partir de la fin des années 60)
- dans certains secteurs économiques ces modèles existent même aujourd’hui

Nous utiliserons le schéma de référence classique, illustré à la figure suivante, qui décrit les relations entre l’environnement et l’organisation de l’entreprise.

relations entre l’environnement et l’organisation de l’entreprise

Ce modèle suppose l’utilisation de l’information pour la prise de décision d’une manière rationnelle, analytique, à base de modèles formalisables, de représentations du marché et de l’entreprise. On parle de traitement de l’information et de l’entreprise en tant qu’unité de traitement optimal de l’information.


1. L’environnement de l’entreprise

L’environnement du modèle de standardisation est défini par :
- une demande mono-caractéristique ou à caractéristiques réduites, en croissance régulière ; la demande est supérieure à l’offre
- un régime de concurrence fondé sur les prix
- une technologie axée sur le développement du machinisme accélérant la division du travail (automatisations électriques et les débuts de l’informatique).

L’environnement du modèle de variété est défini par :
- une évolution vers une demande variée (complexité). Le rythme de la croissance régulière (stabilité) est beaucoup moins élevé.
- un régime de concurrence fondé sur la différenciation et sur les prix. Il faut introduire une variété croissante de produits offerts aux clients, tout en maintenant l’objectif d’élévation du débit pour avoir une réduction des prix unitaires.
- des technologies informatiques relativement évoluées : machines à commande numérique programmables (à cette époque on parle d’informatique industrielle pour commande, contrôle et automatisation et non pas d’informatique pour l’information).

2. Nature de l’information sur l’environnement

Dans le modèle de standardisation, la demande mono-caractéristique ou à caractéristiques réduites, en croissance régulière implique la possibilité d’anticiper l’évolution de l’environnement par des lois de probabilités ou des fréquences d’apparition connues par le décideur. L’environnement est perçu comme simple et stable. L’entreprise reçoit des informations répétitives et prévisibles.

Dans le modèle de variété la croissance régulière, même beaucoup plus réduite qu’à l’époque antérieure, offre également la possibilité d’anticiper l’évolution de l’environnement par des lois de probabilités ou des fréquences d’apparition connues par le décideur. L’environnement est perçu comme suffisamment stable, mais plus complexe que dans le modèle de standardisation.

L’environnement est appréhendé en termes de marketing.

3. L’organisation

L’organisation, dans le modèle de standardisation est basée sur :

  • la division du travail, le découpage de la production en opérations élémentaires simples et la rationalisation des modes opératoires permettant d’élever la vitesse de réalisation.
  • la séparation très nette entre le travail opérationnel, qui transforme la matière pour en faire des produits, et le travail fonctionnel qui prépare, coordonne et contrôle.
  • la spécialisation fonctionnelle qui suppose que des catégories particulières de personnes se consacrent à la détermination "scientifique" de normes de temps et de production, normes optimales de comportement figées et neutralisées pour toute la durée de l’action. La spécialisation fonctionnelle doit permettre de simplifier les problèmes industriels, doit assurer les apprentissages individuels professionnels et des gains organisationnels de spécialisation. Chaque fonction spécialisée doit contribuer à l’élévation du débit, à la baisse des coûts et à l’augmentation du volume de production.
  • la hiérarchisation pyramidale de l’exercice du pouvoir, justifiée par des raisons d’efficience.

Soulignons que cette organisation "scientifique" du travail -* OST (Taylor), figée pour des longues périodes de temps (plusieurs années), est possible grâce à l’hypothèse de stabilité de l’environnement.

Les usines d’automobiles Ford ont été au début du siècle le principal exposant de ce modèle.
Dans le modèle de variété, l’organisation de l’entreprise est pratiquement une adaptation du modèle de standardisation en intégrant :

  • l’exigence de variété en sorte que les économies d’échelle soit maintenues
  • les possibilités techniques offertes par l’informatique
  • la réduction des délais de livraison tout en minimisant les stocks pour la baisse des prix par la diminution des coûts financiers.

La standardisation des produits est transposée à la standardisation d’une variété de composants et d’éléments d’un produit et les flux sont tendus et tirés par les commandes des clients. Il y a une coordination horizontale de la firme (l’école japonaise d’Aoki, Ohno,Shingo).

L’organisation est basée sur :

  • une gestion en flux tendus pour optimiser aussi les temps interstitiels entre les tâches et augmenter la vitesse globale de production
  • une certaine polyvalence des travailleurs, utilisant des moyens informatiques, réduisant les temps de panne ou de reconfiguration du système pour le changement d’outils et le réglage.
    Pour le reste, les autres caractéristiques du modèle de standardisation sont maintenues :
  • la séparation entre le travail opérationnel et le travail fonctionnel (qui prépare, coordonne et contrôle)
  • la hiérarchisation pyramidale de l’exercice de pouvoir.

La première à exposer le modèle de variété a été General Motors sous la direction d’Alfred Sloan. Sloan, homme de terrain, a constaté les exigences croissantes des clients, qui dépassaient depuis longtemps l’époque de Ford T, vers la personnalisation de la voiture. Il en a résulté une multiplication des marques de GM et une multiplication des composants (châssis, moteurs, ailes, éléments du habitacle). La variété s’obtenait par la combinaison de ces composants standardisés, en gardant pour chaque composant la règle de l’élévation du débit comme condition d’efficacité.

La deuxième à exposer le modèle a été Toyota, qui a apporté toute une série d’éléments nouveaux : les flux tendus (le juste à temps et le Kanban), la polyvalence des ouvriers sur la chaîne et surtout la communication horizontale. Des premiers éléments d’assurance qualité sont introduits.

4. Principes de gestion et système d’information de gestion

La division du travail dans le modèle de standardisation et son organisation "scientifique" conduisent à une architecture précise de tâches. Chaque tâche correspond à une activité génératrice de coûts qu’on attribue au travail de l’homme, à une machine ou à un couple homme - machine. Par conséquent le système de gestion et les indicateurs de performance sont basés sur le travail direct.

Pour l’activité opérationnelle, les ressources consommées, la main d’œuvre directe et les consommations de matières font l’objet d’une analyse fine. Le coût du travail direct est considéré comme une part importante du coût total. Les ressources consommées dans les activités fonctionnelles sont affectées aux activités opérationnelles sur la base de la consommation des services fournis par les activités fonctionnelles (répartition des coûts indirects). La répartition erronée d’un coût indirect n’aura qu’une importance limitée en raison de sa part relativement faible dans le coût total. Le produit standardisé final est le réceptacle naturel de l’ensemble de ressources consommées.
Tous les éléments de performance des activités opérationnelles et fonctionnelles sont convertis en valeurs monétaires. Le système de gestion (comptabilité analytique) est une "représentation universaliste financière" fondée sur le processus, connu et stabilisé, d’allocation de ressources pour réaliser le produit. La représentation financière ne s’intéresse pas aux processus opérationnels ou administratifs, aux activités ou aux savoirs. Le processus de production est une "boîte noire" (activités figées) et on se préoccupe seulement de la fonction de coût qui la définit et des entrants et sortants de la "boîte noire".

Le problème de gestion et management est un problème de rendement revenus / coûts. La minimisation du coût unitaire de chacune des activités opérationnelles assure la minimisation du coût total du produit.
Le système de coûts est simultanément modélisateur de la consommation de ressources et système de mesure de la performance. Ce système de gestion est appelé aussi "système métrologique".

De ce système de gestion on observe que les prix, par la réduction des coûts et la maîtrise des marges des profits, sont les éléments des gains par rapport à la concurrence.

Les gains

La comptabilité analytique joue le rôle de système d’information opérationnel (pour la conduite de l’activité quotidienne), mais également de composant du système d’information stratégique (pour la prise de décisions à long terme).

Les activités de support et de logistique connaissent une forte augmentation dans le modèle de variété (il faut assurer le support pour un nombre plus élevé de lignes de production). Le système de coûts suppose deux niveaux. Un premier lié au volume et un second lié à la causalité. Ceci est nécessaire parce que ce n’est pas la notion de produit qui est essentielle mais celle de famille de produits, lots, etc.
La planification et la budgétisation ne sont pas remises en cause, car l’environnement continue à être perçu comme stable, mais relativement plus complexe.

Donc le système de gestion du modèle antérieur reste valable pour des composants et des sous-produits standardisés et, de plus, on fait apparaître des coûts de complexité.

5.Décision et contrôle, éléments concernant la formation de la stratégie

Dans le modèle de standardisation, l’exercice du pouvoir et la prise de décision se caractérisent par une hiérarchie pyramidale, donc une centralisation politique et une centralisation cognitive. Suite à l’hypothèse de stabilité, la coordination de tâches et de fonctions fait apparaître clairement l’exercice de l’autorité hiérarchique et l’attribution des responsabilités opérationnelles. La direction a le pouvoir sur la définition des méthodes de production et l’organisation du travail, ce que l’on appelle "the one best way" ou la représentation unique. Comme le dit Mintzberg "Dans ces organisations, les managers du sommet stratégique se préoccupent pour une large part du réglage minutieux de leur machine bureaucratique".

Cette représentation unique correspond à la rationalité parfaite (l’acteur détient toute la connaissance pour la prise de décision et l’action). La décision implique l’utilisation des modèles mentaux, des représentations, pour lesquels les informations sont des entrants et les actions à engager des sortants. L’action sortante est choisie parmi une gamme d’actions possibles, en fonction des critères du modèle.

Les décisions se classifient en :
a) Décisions stratégiques - long terme
b) Décisions tactiques - moyen terme
c) Décisions opérationnelles - court terme
La généralisation de l’application de cette classification en entreprises et les structures mécanistes de l’OST ont orienté la prise de décisions par catégories d’acteurs : décisions stratégiques - direction de l’entreprise, décisions tactiques - cadres, décisions opérationnelles - agents de maîtrise.
Les décisions du niveau supérieur sont contraignantes pour le niveau inférieur. L’hypothèse de rationalité parfaite implique automatiquement la cohérence entre les différents niveaux de prise de décision.
Il y a une forte descente et remontée des informations pour la prise de décision. L’information qui remonte exclut l’apprentissage (autre que l’apprentissage "mécanique" pour augmenter la vitesse de réalisation d’une tâche). On parle plutôt de l’effet d’expérience pour l’accroissement du volume de production. Le fait que l’information a le temps de descendre montre que la situation est stable. L’hypothèse de stabilité et la non prise en compte de l’apprentissage permettent de négliger l’influence du temps de remontée et de descente de l’information.
La mise en œuvre de la stratégie se fait en redescendant les niveaux hiérarchiques et suppose la planification comme conséquence de la division du travail entre ceux qui formulent la stratégie, les décideurs, et ceux qui l’exécutent.
La fixation des normes, procédures et la planification impliquent le contrôle. Chaque niveau hiérarchique contrôle le respect des normes et des plans en action par le niveau hiérarchique inférieur.
Chaque entité spécialisée et chaque fonction possèdent leurs directions et leurs hiérarchies propres. Chaque fonction permet de séparer l’espace d’exercice du pouvoir.
Selon Mintzberg la stratégie émane du sommet de la direction de l’entreprise qui dispose à la fois du pouvoir et d’une perspective d’ensemble. La division du travail très nette entre ceux qui sont chargés de sa formulation et ceux qui sont chargés de son exécution conduit à l’hypothèse d’une stratégie parfaitement délibérée, créée à travers un processus de planification.
Le pouvoir formel se trouve au sommet, mais, également, la plupart du pouvoir informel se trouve ici. Les managers de ce niveau sont les seuls "généralistes" de la structure, les seuls à avoir une vision de toutes les fonctions. C’est à ce niveau que se trouvent réunies les différentes parties de la connaissance formalisée de l’entreprise.
C’est pour ces raisons que la décision centralisée et la formation de la stratégie à haut niveau sont fortement justifiées.
Par rapport au modèle de standardisation, dans le modèle de variété deux aménagements ont été faits : l’introduction du concept de rationalité limitée et la segmentation stratégique.
La relative complexité de l’environnement implique une limitation du champ d’investigation du décideur. C’est le concept de rationalité limitée qui est introduit et qui postule qu’un individu ne peut disposer de toute l’information pour la prise de décision. On définit comme mode de prise de la décision la "rationalité procédurale", c’est-à-dire des procédures locales cohérentes de recherche de la solution, par rapport non pas à un objectif global, mais par rapport à une procédure globale de recherche de solution.

Le passage de la demande mono-caractéristique à la demande variée a fait apparaître les notions de segment de marché et de domaine d’activité stratégique (DAS). La démarche stratégique délibérée suppose dans ce cas :

  • la détermination des DAS dans lesquels la firme est présente
  • la réalisation d’une analyse sectorielle dans chaque DAS pour positionner la firme
  • le choix d’une stratégie générique pour chaque DAS
  • l’équilibrage du portefeuille d’activités (flux financiers et gestion des risques) dans les différents DAS -* le choix des voies et des modes de mise en œuvre des stratégie génériques.

Cette démarche a beaucoup été explicitée par certains cabinets américains de conseil en stratégie (Boston Consulting Group, McKinsey, etc).
Le degré de complexité plus élevé de l’environnement nécessite l’utilisation des dispositifs de veille afin d’obtenir l’information pour la prise de décision. La veille sert à avoir le plus d’informations qui seront utilisées dans une procédure rationnelle de décision.

6. La culture des modèles de standardisation et de variété

Ce modèle repose sur un compromis clairement établi entre la direction d’un côté, les salariés de base et leurs syndicats de l’autre. La base de ce compromis est la suivante : à la direction et aux cadres, le pouvoir sur la définition des méthodes de production et l’organisation du travail, aux salariés une garantie de progression régulière de leur salaire et de hausse de leur niveau de vie.
Dans ce modèle on n’a pas besoin d’entrepreneurs, d’innovateurs, que à très haut niveau de l’entreprise. C’est à ce niveau que le couplage marché - technologie est fait. Pour les employés des niveaux plus bas, il est demande d’exécuter les décisions prises et respecter les normes et les méthodes fixées.

Les valeurs culturelles qu’on rencontre dans la plupart des entreprises basées sur ce modèle sont le résultat de la fragmentation du travail et de la relation salariale.
Chacun s’intéresse à sa tâche et donc l’unification des intérêts des salariés se fait autour des salaires et non pas autour du produit. La collaboration dans le travail est réduite et on a une culture du "chacun pour soi" dans le travail, "tous ensemble" dans les revendications salariales (syndicalisme fort).
La récompense d’une activité bien faite est l’avancement. Donc la position hiérarchique est vue comme une expression de la performance des activités antérieures. Il y a toute une culture de la "fonction" ou de la "position" qui s’est créée.

L’organisation "scientifique" conduit également à des styles de management profondément enracinés dans la logique cartésienne.
Dans le modèle de variété, on remarque les mêmes caractéristiques que pour le modèle de standardisation.
Pour le Japon, la Suède et l’Allemagne, où l’on a souvent des éléments de coordination horizontale ou des décentralisations de la décision combinés avec l’introduction d’une composante de performance collective dans le système de rémunération, on constate une plus grande coopération autour de la réalisation du produit.

7. Cohérence des modèles de standardisation et de variété

Les modèles de standardisation et de variété sont caractérisés par une forte cohérence interne et externe.

Au niveau interne, le système de gestion comptable permet non seulement la mesure des performances, mais aussi de fonder la prise de décisions d’investissement (comptes prévisionnels, cash-flows et critères financiers, etc).

Au niveau externe, le système de gestion comptable, par l’intermédiaire de la comptabilité générale, est compatible avec les méthodes de valorisation des entreprises (banques, actionnaires, etc) et avec les principes macro-économiques

Source : http://web.univ-paris12.fr/